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La Primauté de la Non-Malédiction dans l’Éthique médicale

La Primauté de la Non-Malédiction dans l’Éthique Médicale

  • 29 juin 2018
  • Par Daniel Moses

Par: Dr Gabriel Andrade, Professeur de Sciences du comportement

Avec une simplification excessive , on pourrait soutenir que l’éthique médicale consiste à équilibrer quatre grands principes, reconnus depuis longtemps comme centraux dans la pratique médicale à travers les âges: l’autonomie, la bienfaisance, la non-malédiction et la justice. Il est communément admis que, depuis les débuts de la réflexion éthique, la non-malédiction est le principe le plus important de ces principes et doit être prioritaire lorsqu’elle est en conflit avec d’autres.

Bien qu’Hippocrate n’ait pas explicitement mentionné l’expression « D’abord ne pas nuire » dans son serment (le serment original stipule en fait « s’abstenir de faire du mal”), elle est inscrite dans la compréhension médicale commune de l’éthique. Et, en effet, son principe prévaut au-dessus des autres.

Prenons, par exemple, le cas d’une personne souffrant de douleurs mineures qui demande à son médecin une administration massive de morphine. Lorsqu’on considère le principe d’autonomie, il semblerait que la bonne chose à faire soit de se conformer effectivement à la demande du patient. Mais, dans la mesure où la morphine est une substance dangereuse avec un grand potentiel d’abus, le médecin doit être conscient que l’administration de morphine causera finalement de grands dommages. Dans ce cas, l’autonomie serait en contradiction avec la non-malédiction. Le médecin doit privilégier le second sur le premier. Tout d’abord, ne faites pas de mal. Bien que le patient puisse désirer une procédure spécifique, le médecin doit réfléchir à la question de savoir si cette procédure particulière sera nuisible pour le patient. Si, en conscience, le médecin croit que la procédure sera nuisible, elle ne doit pas être prescrite, même si le patient le demande.

La non-malédiction peut également être en contradiction avec la bienfaisance. La plupart des médecins ont le désir légitime de faire le bien. Mais, comme le dit le dicton populaire, la route de l’enfer peut parfois être pavée de bonnes intentions. Certaines procédures peuvent sembler bonnes à court terme, mais elles peuvent avoir des conséquences très préjudiciables à long terme (voire à court terme). Encore une fois, le principe premier de l’éthique médicale est d’abord de ne pas nuire. Si, en essayant de résoudre un problème de santé par souci de bienfaisance, le patient se retrouve dans un état encore pire, cette procédure ne doit pas être effectuée. C’est pourquoi, entre autres, lorsqu’il s’agit de nouvelles biotechnologies, la plupart des éthiciens prescrivent un principe de prudence. Dans la mesure où, pour la plupart, nous n’avons pas une connaissance complète du fonctionnement de certaines des biotechnologies les plus récentes, il est préférable de suspendre l’administration de ces biotechnologies jusqu’à ce que des connaissances supplémentaires sur leur fonctionnement soient recueillies. Même si ces biotechnologies offrent de bonnes solutions à des problèmes de santé particuliers, elles peuvent en fait causer des dommages encore plus importants.

La justice peut également entrer en conflit avec la non-malédiction, et encore une fois, cette dernière devrait primer. La juste allocation des ressources dans les soins de santé peut parfois impliquer des procédures qui, en fin de compte, feront plus de mal aux patients. Prenons, par exemple, un cas célèbre avancé par la philosophe Philippa Foot et largement popularisé depuis: « Un brillant chirurgien greffier a cinq patients, chacun ayant besoin d’un organe différent, chacun mourra sans cet organe. Malheureusement, aucun organe n’est disponible pour effectuer l’une de ces cinq opérations de transplantation. Un jeune voyageur en bonne santé, de passage dans la ville où travaille le médecin, vient pour un examen de routine. Au cours du bilan de santé, le médecin découvre que ses organes sont compatibles avec les cinq patients mourants. Supposons en outre que si le jeune homme disparaissait, personne ne soupçonnerait le médecin ”. Le médecin doit-il retirer les organes du patient en bonne santé afin de les distribuer aux patients mourants? Bien sûr que non. Bien qu’il puisse s’agir d’une allocation plus efficace et même juste des ressources, il serait toujours une monstruosité morale d’autoriser une telle greffe. Encore une fois, le raisonnement est que la non-malédiction prime sur les autres principes éthiques.

Ces principes doivent être pris en compte pour une pratique médicale saine. Bien que l’éthique ne soit qu’une partie mineure de l’étape 1 de l’USMLE, c’est une composante énorme de la profession médicale, et pour cette raison, chaque médecin doit comprendre comment fonctionne la non-malédiction.

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